Home Alone

Publié le par Tamilselvi

Quelques jours se sont déjà écoulés depuis mon installation ici. Ainsi que je l'expliquais dans ma dernière note, je vis dans une chambre chez l'habitant. La maison est grande et vide, les habitants discrets et peu loquaces. Je n'avais jamais testé ce concept mais je sens déjà qu'il n'est pas fait pour moi pour le moyen terme. L'impression d'envahir leur maison et en même temps de ne pas pouvoir profiter du fait de communiquer avec eux dans la mesure où l'on se croise à peine... Me voilà seule pour le week-end...

Plutôt que de me morfondre dans ma solitude et chanter All by myself dans cette vaste maison, j'ai tenté de me trouver des endroits à explorer pour profiter de ces jours de vacances. Restait à trouver une activité faisable toute seule et à coût réduit... La multitude de musées, tous gratuits, m'a vite donné envie de les visiter.

Le British Museum, d'abord. Immense, impressionnant, interminable, à n'envisager qu'en plusieurs jours pour pouvoir profiter pleinement de la richesse des collections. Le hall d'entrée grouille de monde, bourdonnement permanent, telle une ruche immense aux abeilles cosmopolites. Partout des touristes, mais aussi des locaux, en vacances, et des enfants, partout, partout... Mes pas m'ont naturellement menée vers la galerie consacrée à l'Asie du Sud et du Sud-Est, moins bondée que les collections de la Grèce antique et les galeries égyptiennes. Ainsi la pierre de Rosette devient vite l'équivalent de notre Joconde, autour de laquelle tous s'agglutinent et prennent des selfies...

Je prends le temps de contempler les statues des dieux qui me sont familiers, des gravures et bas-reliefs pleins de symboles que je sais décrypter. Toujours cette quête de racines qui perdure... Plus d'une heure s'écoule avant que la saturation ne se fasse ressentir, et là, au détour d'une allée pleine de sculptures chinoises en jade, j'entrevois l'imposante pièce dédiée au siècle des Lumières, aux murs flanqués de bibliothèques entièrement pleines d'ouvrages et aux vitrines parsemées dans la salle. Trop de choses à voir en même temps, le regard happé par trop d'éléments à la fois, sensation d'étouffement comme quand une bourrasque nous attaque le visage sans prévenir. C'est le signe qu'il faut partir pour mieux revenir un autre jour pour appréhender cette galerie... comme tant d'autres !

Le Victoria & Albert Museum, un autre jour. Ce musée est situé dans South Kensington, le quartier décrit comme étant la zone des français, où se trouvent notamment le Lycée Français, le Consulat et de nombreux restaurants, cafés et boutiques au noms trop familiers. C'est également le quartier des musées, puisque tout près se trouvent le muséum d'histoire naturelle et le musée de la science, mais, congés obligent, une folle foule de familles avec enfants m'a vite poussée à continuer mon chemin jusqu'au V & A Museum, plus loin sur Cromwell Road.

Il s'agit d'un musée consacré aux arts décoratifs. Je me suis amusée à m'y perdre parmi les objets et tapisseries du Moyen-Orient, les collections indiennes, l'exposition de robes de mariées, l'exposition temporaire consacrée aux objets liée à la désobéissance, qui vaut le détour de par sa diversité et la force des messages issus d'époques que l'on n'a pas vécues.

Harrods devrait pouvoir s'inclure dans la catégorie musées, célèbre institution du shopping haut de gamme, imposante et fière. On ne peut que se perdre entre les salles où les musiques d'ambiance, toujours différentes, précautionneusement choisies, créent une atmosphère adaptée à chaque type de produits exposés, sans jamais s'imposer trop fort.

Ma gourmandise éternelle me fait préférer les salles ayant pour thème les cafés et thés, pâtisseries en tout genre, confiseries, épicerie fine, marchés, restaurants aux mets fins, où les effluves de nourriture ne sont jamais écœurants mais juste présents, raffinés, pour nous faire saliver juste assez afin que l'on cède et achète. Car dans ces salles là au moins, tout comme dans la grande librairie du magasin, on peut se faire plaisir à des prix qui restent adaptés aux produits.

Dégoulinantes de luxe et de démesure, les salles dédiées aux vêtements, cosmétiques, produits décoratifs et autres accessoires délirants pour animaux sont cependant prises d'assauts par des dames aux sacs matelassés Chanel et aux lèvres écarlates. Les étages se succèdent au fil du grand escalator pharaonique, traversant le 'Shoes Heaven' aux chaussures immettables pour atteindre, enfin, au sommet de l'édifice, le 'Salon de Parfums'. Dès lors que je me suis rendue compte qu'il n'avaient pas mon Alien adoré, il était certain que ce 'Salon' n'était pas fait pour moi (tout comme au moins 90% du magasin... enfin bref, passons...) et qu'il me fallait partir !

Le dernier musée où j'ai passé toute une après-midi est le Musée de Londres, qui illustre de façon instructive et vivante l'évolution de Londres depuis la préhistoire jusqu'à nos jours. L'invasion de gamins était à son comble cette fois, et après six mois passés à apprendre l'art de la survie au contact des mioches, je dois avouer que me coltiner des enfants bruyants traînés par leurs parents à travers le musée m'a été moins insupportable qu'auparavant ! La visite est vraiment entraînante, au fil de la grande frise de l'Histoire que l'on suit sur notre voyage à travers les époques, ponctuée d'animations ludiques et des projections vidéos... Le temps s'étire au cours de cette traversée, et déjà il se fait tard.

La nuit tombe tôt par ici. Dès seize heures, le ciel prend des allures vespérales, le crépuscule s'installe bien vite et déjà, nuit noire à dix-sept heures trente.

Plus que le regard silencieux de la Lune qui me contemple rentrer si tôt, si seule. J'avais pensé que visiter ces lieux m'aurait fait oublier mon isolement mais même dans un musée, c'est tellement plus agréable d'être avec quelqu'un pour échanger des avis, confronter des idées... ou ne serait-ce que pour lui agripper le bras et lui dire «regarde !» en désignant quelque chose du doigt, comme une enfant qui se contrefiche des bonnes manières.

Ma bouche s'assèche à force de ne parler à personne tout au long des journées qui défilent. J'entends les pubs de la City, ceux qui sont bondés de 'cols blancs' et de femmes aux talons hauts, je les entends m'appeler. Je me fais alpaguer par les cartes alléchantes des restaurants. Mais sans personne avec qui partager un dîner ou enchaîner des pintes, c'est bien moins drôle... Alors je m'efforce d'ignorer leurs appels, et rentre, là où personne ne m'attend.

J'ai rarement autant eu hâte de reprendre le boulot, où au moins je suis certaine de rencontrer de nouvelles personnes, et de parler, parler encore et encore, car alors enfin j'aurai de nouveau la sensation d'être vivante.

Home Alone
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N
Va voir le Wallace Collection tu vas kiffer aussi par contre photo interdite là bas
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